Brigitte Lemaine (CODA, child of deaf adult) : sociologue, docteure de 3e cycle en philosophie esthétique, a été élevée en LSF par des grands-parents Sourd·es. Elle a réalisé une vingtaine de documentaires sur l'histoire et la culture des Sourd·es, ainsi que sur le handicap et les maltraitances.
« Le travail de James Castle (1899-1977) m'a fascinée depuis que je l'ai découvert sur catalogue en 2002 pour les raisons suivantes : il est sourd et je connais bien cette génération de sourds ayant été élevée en langue des signes par des grands-parents sourds, nés à la même époque. Comme tous les plasticiens sourds à qui j'ai consacré des films, le photographe japonais Koji Inoue (1919-1993) et Pierre Avezard (1909- 1992) artiste français d'art brut, il utilise des thématiques et des formes d'expression propre aux sourds. Comme eux il a été reconnu à la fin de sa vie et ses œuvres sont dans les musées. À travers son œuvre, on peut définir un véritable lexique de toutes les tendances propres à l'art des Sourds. Comme il est resté relativement isolé du reste de la communauté Sourde et du monde de l'art, il a été capable d'exprimer une création "authentiquement visuelle". Il n'a pas essayé de plaire à sa communauté, de la valoriser ou de gagner de l'argent. Dans sa recherche esthétique, il a traduit ses ressentis et sa philosophie de la vie en images, c'est pourquoi j'ai intitulé mon film James Castle, la voie silencieuse. Pour les Sourds du 19ᵉ siècle, le silence était un privilège grâce à la langue des signes. Ils étaient fiers d'être sourds et muets. Davantage encore quand la langue des signes a été interdite au niveau international en 1880 au Congrès de Milan (Italie). Beaucoup de revues et d'associations revendiquaient d'être "silencieuses". » — Brigitte Lemaine